Stock, janvier 2022, 176 p., 18,50 €
Adrien Bosc relate l’engagement de la philosophe Simone Weil dans la guerre d’Espagne, entrecroisant les destins de la fervente républicaine et du monarchiste Georges Bernanos. Simone Weil n’est pas belliciste, c’est une intellectuelle pacifiste convertie au christianisme, mais aussi une femme d’expérience travaillant comme ouvrière et défendant le Front populaire. Le 8 août 1936, elle gagne Barcelone pour être intégrée au sein de la centurie internationale de la colonne Durruti formée de combattants anarchistes. Blessée, elle rentrera en France le 25 septembre. De l’autre côté du front, favorable aux nationalistes, Georges Bernanos est exilé à Majorque. Plus de vingt ans les séparent, pourtant chacun éprouve en miroir de l’autre la désillusion et le dégoût des exactions commises au nom d’un supposé idéal. L’horreur absurde culmine avec l’assassinat d’un adolescent, ce « petit héros » dont Adrien Bosc retrouve la trace au cours d’une enquête dans les marges. Fils d’un instituteur enrôlé de force dans la Phalange, il sera exécuté par les Républicains. Dans une lettre adressée à Bernanos à la parution des « Grands cimetières sous la lune » qui dénonce la barbarie franquiste, Simone Weil fait part de son ressenti analogue côté républicain : immoralité du collectif, divisions, dévoiement du combat. Auteur de terrain, Adrien Bosc arpente l’Espagne et l’Angleterre pour identifier les oubliés de l’Histoire, ces étrangers venus combattre pour la liberté du peuple ibérique, des motivations aussi diverses que personnelles dans leur bagage. Court mais profond, intime et universel, « Colonne » est un livre d’actualité sur la signification de l’engagement et la notion philosophique de « guerre juste ».
Aline Sirba