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“Etat des lieux”, Deborah Levy

Traduit de l’anglais par Céline Leroy, Sous-sol, octobre 2021, 240 p., 18 €

Ce dernier opus de l’autrice anglaise clôt la trilogie de son « autobiographie en mouvement ». Deborah Levy approche de la soixantaine, sa dernière fille quitte le nid familial londonien et elle se retrouve seule, avec l’envie d’une maison à elle, à la campagne ou en bord de mer, un endroit que son imagination crée de toutes pièces, plus vaste que le cabanon d’écriture dont elle est locataire. Matériellement difficile à concrétiser, ce rêve l’accompagne pourtant tout au long de ses déplacements : festival littéraire à Mumbai, résidence d’artiste à Paris, séjour à Berlin, vacances en Grèce… En parallèle, des auteurs nourrissent sa réflexion sur l’espace domestique ; Duras, Beauvoir et Bachelard figurent en bonne place parmi ses références. Partant de l’idée d’un lieu à soi, vide ou plein, elle considère les façons de l’habiter et la liberté dont les femmes y jouissent. Elle prend exemple sur la création, où le personnage féminin n’échappe pas aux préjugés ; indépendant, libre et excentrique, il sera suspect, voire taxé de folie, d’asociabilité ou d’anormalité s’il est seul et vieillissant. Déborah Levy s’attache à l’infra-ordinaire perecquien par sa pratique de l’inventaire, et se rend aussi disponible au dedans que réceptive au dehors. Faisant provision d’anecdotes en apparence futiles et de rencontres fortuites qu’elle intègre à son expérience d’écriture, elle dynamise le genre autobiographique qui s’avère tout à la fois explorateur, narratif et réflexif. L’autrice invite ainsi le lecteur dans son intérieur et dans son intériorité, les lieux l’habitant davantage qu’elle ne les habite, son unique possession et propriété étant son œuvre littéraire.

Aline Sirba

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