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“L’Arbre de colère”, Guillaume Aubin

La Contre-allée, janvier 2022, 352 p., 21 €

Nous sommes au 15e siècle chez les tribus amérindiennes du Canada, en pleine période coloniale. L’héroïne, Fille-Rousse, a été adoptée par la tribu des Yeux-Rouges et passe son enfance auprès des garçons, préférant les jeux de guerre en forêt, la baignade et la pêche aux activités féminines. A l’adolescence, lorsque s’effectue la séparation entre les sexes, Fille-Rousse voudrait ne pas avoir à choisir, et doit gagner le droit de vivre comme un homme. Elle sera donc une Peau-Mêlée, ainsi que le chamane la qualifie, « à la fois homme et femme dans un seul corps ». Rites d’initiation, négociations de paix avec la tribu ennemie des Longues-Tresses, Fille-Rousse sera au centre de bien des conflits et des défiances, avant d’être désignée comme bouc-émissaire. En réalité, son insoumission la condamne à se déplacer à la jonction des territoires entre clans rivaux, puis entre Amérindiens soucieux de leur préservation et Barbes (surnom des Européens) pilleurs de ressources et avides de substances hallucinogènes. Il n’y a aucun manichéisme, la violence se trouve aussi du côté des Indiens aux traditions parfois iniques, et dont le commerce avec les colons est ambivalent tout comme les intérêts et les rapports de pouvoir. Roman d’apprentissage teinté d’écoféminisme, roman sur la liberté, l’identité et l’altérité, « L’Arbre de colère » est moderne dans ses thèmes, porté par une formidable héroïne à la recherche de sa place dans un monde en mutation, curieuse et avide d’histoires, de celles qui jettent des ponts par-dessus les différences : « Il y a d’autres vies. Si je ne peux pas toutes les enfiler, je suis au moins heureux de savoir qu’elles existent ».

Aline Sirba

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