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« L’Epouse », Anne-Sophie Subilia

Zoé, août 2022, 224 p., 17 €

En janvier 1974, Piper et Vivian Desarzens, ce dernier délégué au Comité International de la Croix Rouge, arrivent en Palestine pour une mission d’un an. A Gaza, dans cette région occupée par les Israéliens, ils habitent une maison face à la mer avec un jardin en friche qu’un vieil homme est chargé d’aménager. Piper n’a aucun mandat, ne parle ni l’arabe ni l’hébreu, et ses manières d’Occidentale émancipée suscitent une curiosité désapprobatrice. Ses velléités domestiques entravées par l’abattement devant l’insinuation de sable dans tous les recoins, elle préfère observer le travail méticuleux du jardinier avec lequel elle noue une relation faite de regards et de gestes. Pourtant tout les oppose : tandis que Piper jouit de sa liberté et des privilèges conférés par son statut, Hadj le Palestinien vit sous la menace de l’expropriation par les colons. Peu à peu, malgré les soirées au Beach Club entre expatriés et la découverte de la région, la jeune femme est gagnée par le désœuvrement, l’ennui et la mélancolie ; les disputes au sein du couple se multiplient, et Vivian noie son impuissance humanitaire dans l’alcool. Lorsque Piper s’aventure au dehors, elle est confrontée au dénuement de ses voisins pêcheurs et subit comme eux la tension ambiante due à la présence des soldats israéliens. La prise de conscience de l’abîme entre sa vie bourgeoise et le quotidien des Gazaouis fragilise davantage son équilibre. L’espace du jardin intérieur où cohabitent le beau et l’utile devient alors son échappatoire. Grâce à une écriture délicate et poétique, ce magnifique roman tout en nuance envoûte le lecteur qui se trouve au plus près des sens de ce beau personnage tâtonnant dans sa juste relation au monde.  

Aline Sirba

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