0

“Triste Boomer”, Isabelle Flaten

Le Nouvel Attila, janvier 2022, 200 p., 18 €

Si le titre fait écho à « Tristes tropiques » de Claude Lévi-Strauss, ce n’est peut-être pas un hasard, car c’est en ethnologue qu’Isabelle Flaten étudie ces « boomers » – terme péjoratif désignant la génération d’après-guerre. Voici une comédie sur les maux de notre époque et les brutales accommodations que les tendances sociétales engendrent. Division entre ancien et nouveau monde, entre générations, individus, genres ou classes, l’autrice observe à la loupe des personnages types qu’on croirait tout droit sortis de romans sentimentaux. John (Johnny pour ses voisines cancanières) a fait fortune dans le conseil en développement durable. Or à soixante ans, il se retrouve seul, avec son ordinateur pour unique compagnon. L’adrénaline du monde des affaires l’a quitté, qui lui faisait conquérir les marchés et les femmes. Dépressif, nostalgique, il se souvient d’une ancienne compagne, Salomé, plus jeune que lui, issue d’un milieu ouvrier mais qu’il avait su éduquer. Sa Cendrillon est devenue duchesse, veuve, mère de deux grands enfants, rêvassant sous l’œil réactionnaire d’un aïeul portraituré. Après quelques jours passés dans un centre de développement personnel aux pratiques radicales, John prend la direction du château de la duchesse… Isabelle Flaten outre le trait, passe au vitriol les lubies de notre temps transformées en business lucratif : valorisation du narcissisme, thérapies alternatives, coachisme, promesses de vie harmonieuse. Mais c’est bien la solitude des êtres qui découle de leurs revendications égoïstes. Entre conte de fée détourné et novlangue ridiculisée, cette satire sociale fait mouche.

Aline Sirba

We are using cookies to give you the best experience. You can find out more about which cookies we are using or switch them off in privacy settings.
AcceptPrivacy Settings

GDPR